Invité Dim 6 Juin 2010 - 8:32
De l’angioplastie aux stents bioactifs
La chirurgie au secours du coeur
La chirurgie permet de réaliser ce qui était hier encore impensable. Découvrez ces techniques.
Comment la chirurgie cardiaque s’est-elle évertuée à rétablir le flux sanguin ? Dans les années 1980, les cardiologues ont commencé par utilisé de petits ballonnets fixés sur un cathéter et à le guider jusqu’à l’artère bouchée. Cette procédure baptisée angioplastie fonctionne mais dans près de la moitié des cas, une nouvelle obstruction se produit dans les semaines ou les mois suivants (on parle alors de resténose). La re-fermeture des artères vient de la réaction des vaisseaux sanguins qui interprète le traitement comme une légère blessure, qu’ils comptent soigner en provoquant la prolifération de nouvelles cellules à l’origine de la nouvelle obstruction.
Pour contrer ce phénomène, les cardiologues ont expérimenté à partir de 1994 la pose d’un petit treillis métallique (stent) qui maintient l’artère ouverte après le retrait du ballonnet. Mais dans 20 à 30 % des cas, la resténose intervient tout de même. C’est là qu’entrent en jeu les stents bioactifs qui diffusent des substances capables d’inhiber la prolifération cellulaire et donc le risque de resténose à moyen terme. La large diffusion de ces vertus a entraîné la pose de ces dispositifs chez près de 6 millions de personnes dans le monde. Mais ces stents tant vantés pourraient se révéler particulièrement dangereux.
Deux fois plus de décès à trois ans !
Plusieurs études ont montré que si les stents bioactifs permettaient de limiter les phénomènes de re-sténose en bloquant la prolifération cellulaire, ils augmenteraient le risque de formation d’un caillot, probablement en laissant à nu le treillis métallique du stent. Premièrement rapporté de manière anecdotique, ce risque est aujourd’hui mieux établi. Selon une vaste étude de l’université de Salt Lake City conduite sur plus de 9 000 patients (7 022 ayant eu un stent classique et 1049 un stent bioactif), le risque de resténose après 6 mois a effectivement diminué mais à trois ans, le risque de décès était plus que doublé (x 2,15) chez les porteurs de stents bioactifs1.
Lors du congrès mondial de cardiologie 2006 à Barcelone, une réévaluation de nombreuses études (méta-analyse) confirmait une augmentation du risque de thrombose chez les porteurs de stents bioactifs qui pourrait atteindre 0,6 % par an2.
Pour certains l’obsession de la resténose et la pression des industriels a conduit à une utilisation trop étendue des stents bioactifs, qui ont au final remplacé une maladie le plus souvent non mortelle et curable (la resténose) par une autre plus rare mais également plus mortelle ! Mais pour d’autres, il s’agit-là d’une conclusion un peu hâtive. En effet, les patients qui ont bénéficié des stents bioactifs présentent plus souvent plus de facteurs de risque cardiovasculaire, plus d’antécédents d’accidents cardiovasculaires…
Au final, ces nouvelles données ont permis d’ouvrir le débat mais le risque réel de thrombose reste difficile à évaluer. Dans ce climat d’incertitude, les autorités sanitaires et les sociétés savantes sont-elles capables d’émettre des conclusions ou des recommandations sur l’utilisation de ces dispositifs médicaux ?
Vers une utilisation plus parcimonieuse…
Saisi de la question, un groupe de travail de la Food and Drug Administration (l’autorité sanitaire américaine) a pointé du doigt de nombreuses utilisations des stents bioactifs en dehors des indications : utilisation dans plusieurs vaisseaux, sur des patients présentant peu de risque de resténose… Ils recommandent ainsi que soit souligné le sur-risque de thrombose, d’attaques cardiaques, de mort subite en cas d’utilisation en dehors des recommandations. Par ailleurs, ils recommandent un doublement de la durée du traitement anti-agrégant plaquettaire, qui pourrait passer de six mois à un an3.
Dans certains pays comme les Etats-Unis, leur utilisation est quasi-systématique (plus de 90 % des cas). En comparaison, la France a longtemps été parmi les pays utilisant le moins ces dispositifs. Mais entre 2003 et 2006, la proportion est passé de 6,8 à 52 % des cas, soit légèrement au-dessus de la moyenne européenne de 42 %. Néanmoins, le Dr Blanchard du groupe français de cardiologie interventionnelle se veut rassurant en estimant que les données nationales témoignent d’un bon respect des indications du stent bioactif4.
David Bême - Janvier 2007
1 - Communication scientifique lors du congrès 2006 de l’American Heart Association (Chicago)
2 - Communication scientifique lors du congrès mondial de cardiologie 2006 (Barcelone)
3 - Recommandations du groupe de travail de la FDA – 7 et 8 décembre 2006
www.sante.gouv.fr/adm/dagpb/bo/2000/00-45/a0453102.htm
Décision du 10 octobre 2000.relative à la suspension de distribution et d'utilisation des dispositifs médicaux endoprothèses cardiovasculaires Stenford (Stents non couverts...Stents couverts, réf. STC...
www.sante.gouv.fr/adm/dagpb/bo/2000/00-45/a0453102.htm
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